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Tout au long de son existence, l’être humain, n’aura de cesse, dès les premiers indices du développement de celle-ci, de jongler avec plus ou moins de succès entre les deux aspects majeurs de sa sexualité, le cérébral et le physique.
Cela commence par la découverte du corps et de ses fonctions, au plus tendre des âges, l’enfant grandissant devenant de moins en moins instinctif et de plus en plus perméable aux codes de l’enseignement social.
L’auto-attouchement par exemple, on ne peut plus naturel, devient rapidement sujet à la nomenclature des expressions dédiées aux différents âges, du « touche-pipi » des petits à la « masturbation » des ados, sans oublier la « branlette » plus facilement attribuée aux adultes.
La société, sa morale et ses tabous, magnifiés par les interdits des influences religieuses, n’aura de cesse, elle, que de chercher à contrôler cet état naturel en le codifiant le plus binairement possible, à savoir ce qui est bien et ce qui est mal.
Alors bien sûr, tous les enseignements ne sont pas négatifs, y compris ceux qui, de manière basique aident à l’insertion au sein d’une société dont les critères sont déjà bien ancrés.
Circuler nu, si cela représente inévitablement une véritable liberté, ne peut être considéré comme un choix adapté dans les lieux où la loi l’interdit.
Enseigner la connaissance et l’acceptation d’autres visions de la sexualité que celle le plus couramment proposée, telles que l’homosexualité, va apporter l’instruction nécessaire au respect des autres et minimiser les effets de culpabilité généralement ressentis, si il se trouve que les choix futurs seront orientés dans ce sens.
Poser des jalons sur les méprises et idées reçues fréquemment rencontrées, telles qu’amalgame entre sexualité et genre ou « réputations » infondées représente aussi une aide précieuse à l’ouverture d’esprit en matière d’adaptation sociale.
D’ailleurs, il suffit de s’intéresser un temps soit peu aux cas d’études liés aux pathologies de la sexualité, pouvant amener à des extrémités dramatiques lors du grand éveil de la puberté et bien plus tard, pour comprendre que c’est aux plus jeunes âges que les influences négatives forgent parfois définitivement le futur de notre sexualité, bien au delà des « expériences » vécues avec consentement.
Il serait bon de retenir que l’enfant ne doit pas subir, il doit apprendre, il ne doit pas appliquer, il doit comprendre, et plus tard seulement, il sera à même de partager, car il n’y a d’expérience sans partage, y compris pour la sexualité.
On l’aura donc compris, autant la sexualité possède d’infinies variables ne permettant aucunement de la définir binairement comme beaucoup cherchent à le faire croire, autant se définir soi-même sexuellement parlant n’est pas non plus chose aisée, tant les influences sont nombreuses.
De l’acte sexuel purement reproductif, instinct animal de survie et perpétuation de l’espèce oblige, aux méandres innombrables des raffinements les plus élaborés de cet acte, en passant par la simple acceptation du plaisir sexuel, nombreuses sont les possibilités et les doutes afférents.
Alors doit-on, pour y mieux réfléchir, nous plonger au sein des différentes réflexions des « pros » du sujet, psychanalystes et autres sexologues ?
Bien que l’ayant assez souvent fait, bien plus par curiosité sur l’aspect général de l’étude comportementale que dans une recherche précise sur la sexualité, je ne pense pas que cela soit indispensable, voire même très propice à une confusion accrue.
Déjà aussi parce d’accessibilité réduite à la plupart des esprits non entraînés, mais aussi et surtout parce qu’au sein même de la discipline la controverse fait rage.
Des inconditionnelles exagérations freudiennes à une actualité allant de plus en plus vers un désintéressement du sujet en tant que base même de la psychanalyse, comme le suggèrent des gens tels qu’André Green ou Peter Fonagy, il devient évident qu’une analyse bien plus simple s’impose pour ne pas s’embrouiller l’esprit outre-mesure.
Pour arriver à mieux se définir en revanche, une certaine ouverture d’esprit s’impose presque logiquement.
Les esprits étriqués par une morale ultra conservatrice, la binarité du rapport initialement prévu pour la reproduction au sens strict et impliquant donc deux individus de genre mâle et femelle, la réprimande promise à toute autre vision moins conformiste par les bigots de tout poil, etc sont autant de barrières colossales à l’objectivité d’une auto-analyse.
Bien sûr, en opposition à cela, on trouvera toujours des personnes pour vous citer Matthieu : « Heureux les pauvres en esprit car le royaume des cieux est à eux », dont j’ai la prétention d’interpréter les termes, notamment en phase avec une époque plus moderne, non pas comme s’adressant aux vrais simples d’esprit, mais plutôt comme « Moins vous vous poserez de questions, plus vous accepterez ce que Dieu ou ses VRP terrestres vous imposent comme normalité, plus vous serez heureux dans votre ignorance ».
He bien non.
Foi de veau, foi de génisse, je ne me contenterai pas d’appliquer une dogmatique visant à me faire accepter mon « sort » comme une fatalité et à me restreindre à des pratiques dénuées de toute fantaisie, même la plus innocente, par respect d’un obscurantisme séculaire et ultra réducteur.
D’ailleurs, vu que ce dernier ne concerne en aucun cas la seule sexualité, il va de soi que si je m’y étais tenu, je ne serais pas en train d’écrire ces quelques lignes, et encore moins serai-je ce que je suis aujourd’hui…
Alors justement.
Que suis-je ou plutôt, car le sujet serait trop vaste, où est-ce que je me situe au sein de la réflexion du jour, à savoir dans la recherche de ma sexualité ?
J’en vois déjà d’ici qui se disent : « Chouette du scoop ! » ou encore, pour les curieux modérés, « On va enfin savoir vu la discrétion habituelle sur le sujet »
Détendez-vous…
Je ne fais pas de « coming-out sexuel ».
Primo parce que ma vie privée me regarde tout comme je me moque de celle des autres.
Secundo parce que si je me cite c’est pour donner du corps à ma petite analyse d’ensemble.
Tertio parce que j’estime que mon évolution est un exemple plutôt intéressant dans le cas des personnes liées aux problématiques d’identité de genre, pour qui la confusion sexuelle est assez souvent amplifiée.
Dans mon article de 2012, « Ma vie, de l’homme à la transsexuelle », je survolais délibérément l’aspect sexuel de mon passé, souhaitant, je pense à juste titre, mettre l’accent sur le genre pour respecter le sujet.
« L’avant-Roxanne », si je puis m’exprimer ainsi pour plus de clarté, bien que l’on puisse vouloir m’enquiquiner sur sa présence au préalable, était donc un homme.
Un homme dont l’enfance n’avait, d’un point de vue sexuel en tout cas, pas subi de traumatisme particulier, et accusé en toute logique les influences sociétales classiques d’une éducation standard.
Éveil d’un adolescent lambda, petit bouquin sur la reproduction à 12/13 ans pour identifier le kiki du minou, déjà largement anticipé lors des non moins classiques « comparaisons » entre cousins/cousines…
Bien évidemment l’éveil du désir, manifesté à cette époque envers les filles, et concrétisé dans un onanisme de circonstances, assez peu fréquent à en croire les révélations des copains, fiers d’en profiter pour vanter leurs mensurations « effrayantes ».
Pas mal de flirts, déjà avant même le désir, la séduction possédant chez moi depuis toujours bien plus d’attrait que la sexualité.
Puis la première expérience, assez tôt, vers 14 ans, avec une « plus grande », une fille sympa, attirée selon ses dires par ma sensibilité qu’elle aurait vu s’exprimer lors de mes fréquents passages à son domicile, vu que je fréquentais amicalement sa sœur et plusieurs autres filles d’un même groupe.
Une découverte très plaisante, trop peu renouvelée à mon goût vu les circonstances un peu complexes et la très courte durée de la relation, de surcroît tenue secrète.
Et comme ce type d’occasion ne se présentait pas tous les jours, reprise de l’activité flirts/onanisme (sourire) pendant plus d’un an jusqu’au lycée, où l’époque fut bien plus propice aux exponentielles conquêtes, dès lors quasiment toujours concrétisées dans une relation sexuelle.
Des sorties, des rencontres avec des filles plus âgées, beaucoup de découvertes, beaucoup d’expérience.
Et toujours la même attirance binaire, bien que l’esprit se soit plusieurs fois posé la question si une expérience différente était envisageable avec le genre masculin, se soldant par l’absence de réelle envie, mais sans aucun jugement sur cette sexualité qui ne m’attirait juste pas.
Concernant le troisième genre, une ou deux tentatives de séduction par des personnes transgenres dans des clubs, amicalement refusées pour la même raison que les hommes, une ou deux vadrouilles estudiantines au bois de Boulogne pour me dire simplement « Wow j’avoue que certaines sont sacrément attirantes ! », mais, fut-ce l’amour tarifé ou un blocage sexuel lié à une ambiguïté mal cernée, je ne concrétisais pas cette attirance.
Il y eu toutefois un cas inhabituel à citer.
Lors d’une ballade dans Paris, je fis la rencontre d’une très jolie fille qui croisa ma route.
Regard mutuellement appuyé, un peu de courage et quelques mots, un verre, une conversation et contre toute attente une invitation sans trop d’équivoque.
C’est en chemin que j’appris que cette fille était hermaphrodite, cas extrêmement rare d’une femme biologiquement classique, mais dotée en sus de son appareil génital d’un attribut pénien.
Étrangement, je l’écoutais et l’observais, et la trouvais toujours aussi attirante, ni plus ni moins après cette révélation. Évidemment, un léger doute quant à l’inconnu de cette situation était né mais j’en faisais fi, tout comme durant la version plus intime ; au final pas d’attirance particulière pour le « détail », mais aucun dégoût non plus.
Si ce type d’expérience peut paraître anecdotique, l’enseignement lui, tôt ou tard, le sera beaucoup moins…
Ma vie d’homme fut ensuite jalonnée de relations amoureuses variées, dont certaines sur d’assez longues durées, jusqu’à la dernière, encore liée à mon statut masculin, avec la mère de mon enfant, seule véritable relation de cette époque où la communion sentimentale et sexuelle étaient réellement en phase.
L’anecdote, sur cette longue période, fut la réalisation d’une expérience bisexuelle, au cours d’un jeu avec une partenaire qui, à vrai dire, avait certainement plus le fantasme de voir cela que moi de le réaliser, mais il serait un peu idiot d’avoir des remords sur ce que l’on consent.
Ce n’était d’ailleurs pas si mal, en tout cas pas rébarbatif, juste pas assez motivant pour souhaiter réitérer.
Puis il y eu la genèse de Roxanne…
Je ne vais pas reprendre ce que j’ai déjà dit à ce sujet dans cet autre article.
Je parle ici de sexualité.
Alors bien sûr, je termine celui-ci en parlant de la rencontre avec une femme.
Et, hormis divers articles mentionnant des rapports essentiellement de dialogues virtuels avec des hommes, et peut-être quelques poésies si vous savez lire entre les lignes, il n’est affiché nulle part que j’ai entretenu une ou des relations avec des hommes, ni même pratiqué une sexualité de ce type.
Et pourtant c’est le cas.
Y a-t-il une raison particulière à ce « non-dit », une forme de honte, une volonté de camoufler une ambivalence quelconque ? Aucunement.
Si je n’ai rien à cacher ce n’est pas pour autant que j’ai tout à dire…
Pourquoi alors avais-je parlé de cette femme ?
Parce que j’en avais envie pardi !
Parce que j’exprimais mon ressenti après un immense choc physiologique et psychologique et que cette rencontre m’avait beaucoup apporté.
Serait-il pour autant logique d’aller clamer publiquement ce qui n’est que vie privée, c’est à dire uniquement intéressante pour moi et le/la concerné ?
Aujourd’hui, j’en fais part, et ce uniquement comme précédemment cité dans le but de mieux expliquer la construction de ce qui à présent est ma sexualité et d’amener qui cela intéressera à réfléchir à sa propre construction.
J’en reviens donc aux débuts de Roxanne.
A cette époque j’étais donc, et ce durant cinq années suivant l’appellation courante, une travestie, c’est à dire que je pouvais continuer à vivre ma vie d’homme en apparence, apparence que j’avais appris à moduler en version féminine suivant les circonstances.
Cinq années pour m’analyser, m’étudier, m’appréhender, me comprendre et éventuellement évoluer vers le transsexualisme, décision lourde à ne pas prendre à la légère.
Si presque tout l’essentiel de mes doutes et de la nécessité de cette analyse reposaient sur le pour et le contre d’un tel choix en imaginant son impact sur ma vie humaine future, sociale et familiale entre autres, je ne négligeais aucun aspect de celle ci.
Être une nouvelle personne implique des bouleversements dans presque tout et je me suis donc aussi interrogée sur la sexualité.
Moi qui jusqu’à présent avait préféré la compagnie des femmes et les relations sexuelles avec elles devais-je, en tant que femme en devenir, persister dans cette vision ou au contraire changer pour rejoindre une version somme toute plus logique de mon ancienne binarité ?
En proie au doute, et grâce au truchement si facile du dialogue virtuel, je me mis à fréquenter des sites de rencontre dédiés au « troisième genre » et à risquer mes guêtres à l’extérieur du confort de chez soi, dans des lieux tout aussi dédiés, bien trop angoissée à l’époque pour faire face au monde.
Mais justement.
Là est le piège.
Enfin n’exagérons rien, disons plutôt là est le leurre.
Lorsqu’une travestie s’adresse à un homme qui est « amateur du genre », sachant que l’intention de celui-ci est une faveur sexuelle, il va donc user de tout artifice possible pour l’en convaincre.
Et si il en est un qui fait très souvent mouche, y compris chez les femmes biologiques, surtout lorsque la confiance en soi n’est pas très développée, c’est le compliment.
Salace ou bien tourné, tant qu’il magnifie la femme en vous, sa beauté, sa grâce, sa féminité tout simplement, l’effet est inévitablement euphorisant.
On s’en délecte, on rougit, on veut y croire, même si l’on sait qu’il y a toujours une part d’exagération intentionnelle.
On s’en fout, ça fait du bien et puis c’est tout.
Du coup, de plaisants termes en compliments ciblés, le rouge ne fait pas que monter aux joues…
Le thermomètre hormonal en prend aussi un coup.
Parce que, ne l’oublions pas, mais la testo on en a autant que lui !
La libido est sensiblement de nature similaire.
Alors comme on entend ce que l’on a envie d’entendre on s’imagine de plus en plus facilement être la femme qu’il décrit et on finit le plus souvent, avec un peu d’attirance tout de même, par céder aux avances pour « vivre » concrètement ce ressenti.
He oui, à cette époque je me faisais un monde, comme beaucoup, du rejet des autres, imaginé violent, impitoyable, moqueur.
Difficile de se sentir bien dans ce climat sulfureux.
Du fait, on trouve forcément bien plus sympathique les lieux où l’on est « divatisée », même si en grattant la croûte, on réalise que tout n’est qu’intérêt.
Ceci a donc été le début d’une nouvelle découverte sexuelle, non plus considérée comme celle d’un homme avec un homme, mais comme celle d’une nouvelle femme, certes avec ses différences, avec un homme.
L’ai-je appréciée ?
Oui.
Uniquement parce qu’elle me donnait le sentiment, illusion ou réalité, de me sentir femme, ou plus femme ?
Certainement au début oui, et par moments, suivant la qualité de celle-ci.
Et c’est là où le bas a commencé à blesser, à une époque où plus mes doutes sur mon choix à faire s’envolaient pour laisser place à une certitude, plus je me confortais dans cette habitude prise, une sexualité devenue « logique ».
Puis il y a eu la transformation et ses bouleversements psychologiques, physiologiques et une nouvelle vision au bout des premières épreuves.
Le traitement hormonal a souvent pour effet, surtout en cas de prise d’anti-testostérone, d’occasionner une très forte baisse de la libido.
La vision du monde, comme décrit dans l’article, change souvent assez radicalement, car des variations au niveau de la perception s’affirment, conduisant souvent à certaines remises en question.
Mais psychosomatiques ou pas, l’on n’est plus tout à fait la même après coup et forcément les répercussions se font à diverses échelles.
Moins de libido, une évolution du corps qui ne laisse plus aucun doute, et puis cet appareil génital masculin qui, tant qu’il est encore présent, sera un problème pour certaines, un détail pour d’autres.
On ressent une affirmation de soi, une confiance accrue, et le besoin de prouver que ce choix a été fait pour être assumé. Les coming out, si cela n’a déjà été fait, se font. La femme petit à petit s’impose, en elle comme devant l’extérieur.
Je parle bien sûr de manière générale, il serait présomptueux vouloir faire d’un exemple, en l’occurrence le mien, celui de toutes.
Cette femme nouvellement née, plus forte, plus déterminée, s’impose donc et en impose, mais cette construction ne se fait pas toujours en quelques mois.
C’est durant cette période que j’ai écrit un article assez explosif, « hypocrisie sexuelle masculine, ou comment faire pour nuire à une trans ».
Sujet à controverse, je comprend avec le recul à quel point j’étais par trop intransigeante, voire sectaire.
Je reprochais entre autres à certains hommes se prétendant hétérosexuels et très exigeants sur l’apparence féminine de leur conquête, d’avoir pour penchant premier, lors d’un rapport avec une transgenre, une attitude que je qualifiais de résolument homosexuelle, par leur attirance pour l’organe masculin.
Je les qualifiais donc d’hypocrites complets, désirant une façade pour concrétiser leurs désirs inavoués.
Au même titre, je reprochais à certaines trans de se prétendre femmes et de continuer à utiliser leur organe à la manière masculine.
Là où je me trompais, c’est qu’au delà de l’artifice des mots évoqués pour séduire (qui n’en emploie pas?) je ne faisais que perpétuer la logique de ce qu’au final je critique le plus : la binarité.
L’homme doit te voir comme une femme et occulter ta particularité parce que votre rapport doit être celui d’un homme et d’une femme pour que tu t’épanouisses…
La trans doit se comporter comme une femme parce que c’est ce qu’elle voulait et doit donc abandonner toute pratique à connotation masculine….
He bien voilà un beau tissu de conneries complètement contradictoire avec ma propre philosophie.
Mais bon à cette époque j’étais en mode dents acérées/esprit qui se cherche et j’avais plus envie de gnaquer que la vraie gnaque…
Comme dirait l’autre il n’y a que les cons qui ne changent pas d’avis, et je garde cet article tel quel, comme témoin d’une certaine évolution.
En témoigne donc ce mea culpa, depuis j’ai pas mal évolué, je me suis recentrée sur moi au lieu de m’éparpiller à vouloir tout appréhender de ce qui peut se faire, j’ai fait de nouvelles rencontres, plus abouties, plus originales, plus en phase avec moi et ma conception d’une relation, même épisodique.
J’ai même, et ça c’était une grande première, entrevu la capacité à avoir des sentiments pour un homme…
Cela va peut-être paraître stupide pour certains mais cela n’avait jamais été le cas.
C’était juste sexuel, certes parfois intense et plus ou moins durable, mais « aimer » ?
Me sentir amoureuse ?
Comme je l’avais précédemment vécu avec des femmes, ça c’était la quatrième dimension…
Il a fallu une rencontre avec un homme totalement étranger au « milieu », rencontre improbable préalablement virtuelle débouchant sur un échange amical de plus en plus intense, évoluant vers une attirance réciproque jusqu’alors inégalée, autant sur le plan physique (visuel photo) qu’intellectuelle.
Il m’a bien fallu alors annoncer ma différence et entendre, à ma plus grande surprise, que cela ne remettait rien en question, pour réaliser que j’avais franchi un cap essentiel dans mon évolution.
Tout est possible si, à commencer par soi, et dans la mesure où l’on tombe sur quelqu’un ayant une belle ouverture d’esprit, on cesse de tout voir et de tout croire sujet à la binarité.
Alors pourquoi tous ces détails sur le passé, de l’enfance à maintenant, pourquoi ces anecdotes diverses, ces expériences vécues, ces erreurs de jugement reconnues ?
Tout simplement parce que chaque être est riche de cela, que tout le monde doit pouvoir tirer enseignement des choix, bons ou mauvais, qui ont jalonné son existence.
Qu’un peu de bon sens et une bonne dose d’humilité permettent de comprendre que cela ne sert strictement à rien de vivre sans s’améliorer.
Mon parcours n’est pas utilisé ici comme mètre-étalon ni comme exemple type, il montre juste que tout n’est que constante évolution.
Le petit garçon bien éduqué, l’adolescent bien dans la norme, l’homme pas trop fermé mais bien binaire et soudain paf ! La complète remise en question.
Du coup je suis redescendue de mon piédestal de « chercheuse en sociologie transgenre avancée », j’ai arrêté de reprocher aux autres de mettre les gens dans des cases alors que je ne faisais que changer les étiquettes, j’ai arrêté de vouloir à tout prix cerner le mal et le bien chez tout un chacun parce que ça aussi c’est binaire.
J’ai réalisé à quel point je me gourais, à quel point j’avais pu m’afficher plus intolérante que les intolérants, à quel point il est important d’avoir des tripes pour rester humaine mais que la réflexion est un art subtil qui se pratique avec tout son être, et dont le cerveau, nettoyé le mieux possible des principes à réflexes conditionnés, doit être et rester le centre.
Je me considère donc aujourd’hui comme bien plus épanouie, plus moi-même que jamais, débarrassée de l’essentiel des carcans dont j’avais soupçonné l’existence, puis entrevu la réalité, sans vraiment comprendre qu’ils reposaient autant sur mes épaules que sur la plupart des gens que je critiquais.
Et voyez-vous, bizarrement, alors que j’étais capable d’approfondir maintes réflexions sur tout un tas de sujets sociologiques, philosophiques et autres, il a fallu que je m’attache à comprendre ma sexualité pour réellement ouvrir les yeux sur plein de réalités.
J’ai enfin compris que la sexualité n’est pas juste un acte à partager avec de tierces personnes, elle est aussi une partie du reflet de soi. S’interroger à son sujet, se poser les bonnes questions, c’est la faire évoluer, c’est soi-même évoluer.
Peut-être, à cette lecture, certains s’interrogeront, peut-être certains ont-ils atteint cette maturité et l’on même dépassée, mais dans tous les cas, je serai heureuse d’avoir pu partager un petit peu de cette intimité, si elle a pu servir à quelque chose, au moins à offrir un sourire.
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